Peste soit des pesticides

Paysage rural du Jura. Photo: PHB/JDC

Paysage rural du Jura. Photo: PHB/JDC

Nos environnements urbains ne sont pas uniquement concernés par la pollution due aux émissions de gaz à effet de serre en provenance du chauffage urbain ou des véhicules à combustion d’énergie fossile. La campagne c’est bien loin mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, les pesticides épandus par les agriculteurs peuvent tout à fait croiser nos narines avenue de l’Opéra et s’infiltrer dans nos poumons puis dans notre sang. Sachant que certains pesticides ont été classés comme « cancérogènes probables » dernière étape avant la mention « cancérogènes certains » par l’OMS, cette pollution venue d’ailleurs devrait nous préoccuper davantage.

Dans le volumineux rapport de la Cour des comptes sur les « Politiques publiques de la lutte contre la pollution » de l’air qui vient d’être rendu public, un chapitre est consacré à la pollution agricole. Ce chapitre de deux pages est d’autant plus intéressant que la question agricole est quelque peu taboue en France et que l’on préférera toujours, en matière d’environnement, pointer du doigt les industriels ou les particuliers.

Or, comme le rappelle la Cour, si les pesticides entrent bien « dans la définition des polluants fixée par le Code de l’environnement« , ils ne sont pas contraints par une quelconque réglementation hormis la norme concernant la pulvérisation interdite quand le vent dépasse force 3 sur l’échelle de Beaufort soit entre 12 et 19 kilomètres par heure.

Malgré cette norme nous indique le rapport, les pesticides sont présents de manière chronique dans l’air. Lors d’un épandage est-il précisé, les gouttelettes les plus légères peuvent très bien refuser de chuter et être ainsi déplacées par le vent sur de longues distances. 114 substances actives sont ainsi présentes de façon chronique dans l’air que nous respirons ce qui est tout sauf neutre. Le gouvernement recommande aux agences spécialisées de proposer de dresser la liste de 10 et 20 de ces molécules méritant une surveillance particulière.

Prudente comme toujours, la Cour des comptes se borne à écrire que « l’impact sanitaire des pesticides par voie aérienne sur la population est pour le moment mal connu« . De « fortes présomptions » ce qui pourrait être traduit par de « fortes certitudes » en raison des précautions de langage proverbiales des magistrats de la Cour, existent sur les effets néfastes causés aux populations exposées. On ne sait pas grand chose en revanche, précisons-le, de l’effet sur les populations lointaines, c’est à dire celle des villes.

Les auteurs du rapport concluent quoiqu’il en soit, qu’il serait pertinent (en 2016!) d’améliorer les connaissances sur le sujet, de commencer à limiter en attendant, les émissions de pesticides et en rendant obligatoire par les AASQA (les agences de surveillance) la surveillance de la présence dans l’air des agents « les plus nocifs« . Il serait bien temps si l’on veut bien se souvenir ce qui est d’ailleurs écrit dans le préambule du rapport, que les Français placent loin devant le réchauffement climatique, leur inquiétude liée à la pollution de l’air.

PHB