Il flottait comme une ambiance de pionniers (éclairés) pour la première journée de « l’énergie hydrogène » qui se tenait hier au Parc Floral. L’ensemble de la filière pouvait s’y serrer les coudes et échanger en connaisseurs parmi les moins affranchis. Des taxis « Hype » (Hyundai) à hydrogène assuraient les navettes avec les transports en communs tandis qu’à l’intérieur chacun pouvait admirer la Mirai, « le » véhicule H2 grand public produit depuis l’année dernière en série par Toyota. Allo PSA, Allo Renault?
Nous vivons dans un monde curieux vouant aux gémonies les énergies fossiles comme le charbon ou le pétrole, déplorant que les véhicules électriques aient une aussi faible autonomie et par trop dépendants de l’électricité nucléaire tandis qu’en marge de ces filières, un petit monde d’ingénieurs expérimente depuis un moment des véhicules électriques utilisant de l’hydrogène fabriqué avec de l’eau et que des industriels assez largement asiatiques sont passés à l’action avec des véhicules ou des générateurs désormais distribués dans le commerce.
C’est effectivement bien étrange. Lors de la Cop21, les visiteurs du Grand Palais avaient pu constater la simplicité du système de fonctionnement d’une voiture électrique à pile à combustible fonctionnant à l’hydrogène. Soit un moteur électrique que viennent alimenter à la fois une batterie et une pile à combustible le tout relié à un réservoir d’hydrogène sous forme de gaz comprimé. L’ensemble démarre en silence, roule sur environ 500 kilomètres, ne rejette que de la vapeur d’eau avec un plein fait en moins de cinq minutes pour un prix équivalent au même volume de pétrole. En gros, l’Asie fait la course en tête (symptomatiquement la plus grosse station de distribution d’Air Liquide se trouve en Chine), l’Allemagne a pris le train en marche tandis qu’en France on se hâte lentement, cohérence avec la volonté d’un transit énergétique oblige. Le surcoût de la filière dihydrogène est souvent évoqué. Mais enfin lorsque l’on surpaie l’éolien ou le solaire, énergies par ailleurs intermittentes, on ferait bien d’intéresser aux vertus du dihydrogène.
Et pourtant, outre Air Liquide, il existe bien une filière française, qui pour concevoir par exemple des prolongateurs d’autonomie pour des véhicules électriques classiques, qui pour fournir le boîtier électronique qui va adapter le courant au moteur, logé entre la pile à combustible et les batteries.
Dans une note préalable à ces deux journées préfigurant un avenir décarboné pour qui veut conduire sa voiture sans avoir l’impression culpabilisante de tuer un ours polaire ou de noyer les Maldives, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, reconnaît à mots feutrés, que « les progrès techniques réalisés ces dernières années dans la filière hydrogène pour des utilisations à des fins énergétiques et les défis de la transition énergétique, créent des conditions favorables » au développement du « vecteur« . Difficile de voiler davantage son enthousiasme.
Une voiture, un autobus, un chariot élévateur, un générateur pour les endroits isolés, tout est devenu concret. Il y avait même hier une société de Biarritz (Pragma industries) qui présentait son prototype de vélo à assistance électrique pourvu d’un système à hydrogène avec suffisamment d’électricité générée pour recharger un téléphone ou faire fonctionner un GPS.
Il ne manque plus au fond que la volonté politique pour donner à cette énergie bien plus propre que les autres (quand elle est fabriquée par électrolyse) l’impulsion déterminante. Le même type de volonté qui a encouragé la motorisation diesel. Il faudrait juste changer de registre. PHB