Contrairement à la France où les autorités ont une sainte trouille de la consultation référendaire, le gouvernement de même que le parlement suisses, ont jugé préférable de consulter leur population avant de poursuivre la production d’énergie d’origine nucléaire. Près de 60% des votants ont choisi la sortie, scellant le sort des futures centrales qui devaient être construites. Les sondages abondaient en ce sens et c’est donc avec une extrême sagesse que les autorités politiques du pays ont préféré aller vérifier si leur projet de loi sur l’énergie s’accordait avec les aspirations du peuple.
L’État suisse a une longue expérience du nucléaire. Elle remonte à l’après-guerre et comportait même un programme d’armement spécifique. Le pays qui ne compte que cinq réacteurs tire un peu moins de la moitié de son énergie globale du nucléaire. Un seul accident classifié 4 sur une échelle de 7 a eu lieu en 1969 avec la fusion partielle d’un réacteur. Il semble qu’avec l’accident de Fukushima en 2011 l’opinion publique ait évolué vers le sens d’une sortie. Le premier parti politique du pays (L’Union Démocrate du Centre) était également pour se tourner vers des énergies subsidiaires au contraire des autres organisations. L’hydraulique, le solaire, la géothermie et la biomasse seront désormais favorisées et la Suisse va devoir organiser le démantèlement de sa filière atomique.
Mais ce qui frappe dans la décision -souveraine- de nos voisins, c’est qu’ils ont eu le choix. En France où l’énergie nucléaire constitue un État dans l’État avec 410.000 emplois dont 125.000 en direct selon les chiffres d’Areva, la pratique du référendum effraie toujours les autorités. Tout devient compliqué dans l’hexagone dès lors qu’il s’agit de consulter une population qui ne comprendrait pas les vrais enjeux. C’est vrai pour Les jeux olympiques à Paris, c’est vrai dans d’autres domaines et il est peu probable, en l’état actuel des choses, que le choix de la production d’énergie soit un jour confiée au peuple. Benoît Hamon, candidat écarté de la récente élection présidentielle voulait une France « pionnière » de la transition écologique et voulait « remettre les citoyens au cœur de la décision publique » au moyen il est vrai d’un « 49.3 citoyen » un peu complexe pour être honnête. Quant au président élu, son programme dans ce domaine ne brillait pas pars sa transparence car voulait dans son propos de campagne « réconcilier » la croissance et la transition énergétique. Tout dépend de ce qu’il y aura dans ce rapprochement.
Dans le domaine du « renouveau démocratique » on pouvait noter une volonté de « réduire » la représentation parlementaire et de « renouveler les pratiques politiques« , mais pas de déclaration d’amour limpide pour le canal référendaire. Ce qui est bien dommage s’agissant d’un mode de consultation aux résultats forcément inattaquables parce que souverains.
Pour en revenir au nucléaire français la stratégie reste et -probablement- restera aux mains des élites qui se fondent sur leurs connaissances réputées supérieures. Telle une antienne, elles mettent toujours en avant l’excellence d’une filière qui ne compte, malgré un parc de centrales gigantesque, aucun accident majeur comme ceux de Three Mile Island, Tchernobyl ou Fukushima. C’est pourtant cette même excellence qui, dans le domaine de l’aéronautique au hasard, a envoyé un Concorde au tapis en l’an 2000 avec ses 100 passagers. Comparaison n’est pas raison, mais la probabilité existe toujours, malgré les paroles rassurantes répétées comme autant de mantras. Si une centrale déraille un jour dans les proportions de celle de Fukushima, il sera alors trop tard pour regretter de n’avoir pas consulté les Français sur le sujet. Les Suisses, eux, ont pu trancher en toute responsabilité.
PHB