Degré d’urgence

Ah l’urgence-climatique, que de fois n’a-t-on pas entendu ce syntagme au cours de la dernière campagne électorale pour les européennes et même à tout bout de champ. Or dans l’édition du Monde daté 2/3 septembre, l’incontestable climatologue Jean Jouzel n’abonde pas dans cette direction. C’est un scientifique, ex vice-président de Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui étudie les glaces et le climat depuis fort longtemps. Pour lui en effet « l’effondrement n’est pas imminent« , le réchauffement est progressif. Ce qu’il ressort de ce passionnant entretien livré au Monde c’est que oui, il y a bien un réchauffement et qu’à travers les âges, et que ce phénomène est bien lié à la concentration de gaz à effet de serre, mais aussi à la « position de la Terre par rapport au soleil ». Le CO2 que l’activité humaine engendre vient en revanche « amplifier le phénomène« . C’est une addition qui est à l’œuvre.

Tout l’intérêt de ces réflexions vient de ce qu’elles apparaissent délivrées de ces combinaisons de mots essentiellement faites pour structurer un discours politique et donc vendeur. Jean Jouzel a beau être un homme de gauche, engagé, il n’en reste pas moins un homme de science. Pour lui les prévisions du GIEC sont bonnes. Celles qui estiment que le « global warming » peut être contenu dans une limite de 2 à 1,5°, « si tout le monde avance dans le même sens« . Et qu’il sera bien difficile à l’humanité d’encaisser à terme une hausse de 3° susceptible de déboucher sur des « conflits majeurs« .. Cependant Jean Jouzel est optimiste notamment en raison de la mobilisation des jeunes sur ce sujet. Et aussi parce que, rappelle-t-il, si les chevaux ont disparu de Paris en 10 ans, il pourrait bien en être de même avec les moteurs thermiques (1). Il y aurait donc de l’espoir selon lui si l’Europe voulait bien ne pas rater le virage qui se présente.

« La problématique climatique » ne doit cependant pas faire oublier la nécessité d’une approche environnementale globale, comprenant l’action en faveur du maintien des espèces et de la flore, de la reforestation, de la protection des rivières et des océans. À titre d’exemple si les Européens au lieu de découvrir dans les journaux qu’une île de plastique géante (ce qui était le cas dernièrement) dérivait vers la Corse, s’ils pouvaient lire que l’Europe dépêchait des bateaux spécialisés pour en venir à bout, on passerait enfin des incantations à l’action. Au-delà des mots-valises qui se dévaluent à force d’être rabâchés.

PHB

(1) Ne pas organiser les Jeux olympiques à Paris, ne pas favoriser l’afflux massif de touristes par voie aérienne, voilà ce qui pourrait également constituer des pistes à étudier