Face aux réalités

En quelques jours et en Gironde, c’est plus que l’équivalent des Hauts-de-Seine qui est parti en fumée. Autant dire que les dégâts du méga-brasier favorisé par les chaleurs intenses sont largement visibles depuis l’espace. Les milliers de vacanciers évacués ont ainsi pu faire une jonction précise avec ce que les journaux télévisés disent, ce que les politiques ne cessent de clamer et leur vie propre. Une anormalité climatique, due aux émissions de gaz à effet de serre, a en l’occurrence, fait office de turbo. Les signaux d’alerte ne datent pourtant pas d’hier. Dans les années soixante-dix, René Dumont avait averti. Et en 1976 précisément, un phénomène comparable (et trop vite oublié) avait proprement asséché la France. Cette leçon de choses toute récente en revanche, notamment matérialisée par la disparition d’hectares de pinède, sera sans aucun doute beaucoup plus efficace que les discours à répétition pour sensibiliser les consciences à la nécessité de préserver l’atmosphère. D’abord pour respirer un air meilleur, paramètre trop négligé et surtout parce que les conséquences du réchauffement en cours sont à nos portes.

La Cop 27, décalée pour cause de pandémie et qui aura lieu en Égypte au mois de novembre, sera malheureusement l’occasion de constater que les promesses d’aides financières de la Cop 21 en direction des pays les plus pauvres n’ont pas été tenues, loin s’en faut. S’y ajouteront quelques éléments décourageants au problème global. Pêle-mêle on peut citer l’Allemagne, obligée de réactiver ses centrales à charbon pour cause de guerre en Ukraine (et alors que des centaines sont en construction notamment en Asie), on peut aussi mentionner l’avionneur Boeing qui prévoit une augmentation considérable du trafic aérien d’ici moins de vingt ans et par dessus tout, une population mondiale qui ne cesse de croître, pour atteindre les huit milliards d’individus au mois de novembre prochain selon les prévisions du World Population Prospects. C’est le plus mauvais des paramètres actifs à l’égard de la crise écologique globale, même si à long terme une tendance au tassement démographique est attendue. L’atmosphère, les océans, la flore et la faune n’en profiteront pas. Il n’y a malheureusement pas besoin d’être un expert pour prédire que tout cela ne va pas dans le bon sens. Mais progressivement et si l’on peut dire catastrophes aidant, l’opinion mûrit. Ce qui signifie qu’elle est prête à comprendre qu’une politique environnementale comporte aussi des bénéfices et pas seulement des contraintes.

Une bonne nouvelle est qu’en France (entre autres), la nécessité de veiller à notre environnement a désormais intégré la parole politique. Cela signifie que la modification du cap des sociétés modernes, notamment dans son économie, ses modes de consommation, est en cours. Trop tard sans doute pour les proches années (il faudra s’adapter) mais pour les générations à venir, il est permis d’espérer.

Louise Lapierre